Les preuves apportées par le parquet et les Etats Unis ne permettent pas d’affirmer que Jesús Santrich -arrêté en avril 2018- a trafiqué de la drogue après l’entrée en vigueur de l’accord de paix de 2016, selon la Juridiction spéciale pour la paix. Mercredi, les magistrats ont donc ordonné la remise en liberté du chef guérillero, rapporte notre correspondante à Bogota, Marie-Eve Detoeuf.
Une libération qui a aussitôt provoqué un tollé dans les rangs de la droite dure qui juge le Tribunal pour la paix trop laxiste. Coup de théâtre : le procureur, Nestor Humberto Martinez, démissionne, accusant le tribunal pour la paix de menacer la démocratie. Son adjointe María Paulina Riveros lui emboîte le pas. La libération de Santrich traîne inexplicablement plus de 48 heures.
Vendredi matin, le bruit court que le président Ivan Duque, qui a exprimé son soutien au procureur, va décréter l’Etat de commotion intérieure et extrader le prisonnier qui, dans sa cellule, tente de se couper les veines. Quand Santrich est finalement libéré dans l’après-midi, des dizaines de caméras l’attendent à la sortie de la prison. Mais nouveau coup de théâtre. La police arrive et l’arrête. Le parquet affirme détenir de nouvelles preuves contre l’ancien guérillero.
Coupable ou non, Santrich se retrouve au cœur de la confrontation entre les partisans de l’accord de paix et ses détracteurs dont l’ancien président Alvaro Uribe qui est immédiatement monté en première ligne. Le Tribunal pour la paix, qui a des milliers de dossiers en attente, se trouve fragilisé mais la justice ordinaire également. Certains analystes et responsables politiques d’opposition rappellent que le procureur démissionnaire Martinez était mis en cause dans le scandale Oderbrecht.