Près de sept millions d’électeurs sont appelés aux urnes ce dimanche 9 février au Cameroun, pour les élections législatives et municipales. Une partie de l’opposition a appelé à boycotter ces élections.
Un clip diffusé régulièrement à la télévision et même des rappels par SMS. Elecam, la commission électorale, a mis les bouchées doubles ces derniers jours pour inciter les Camerounais à aller voter.
Les autorités et le parti au pouvoir ont un « double intérêt » à vouloir éviter une forte abstention, explique Arrey Elvis Ntui, chercheur pour l’International Crisis Group. D’abord, limiter l’impact du boycott du MRC de Maurice Kamto sur la légitimité du scrutin, – c’est la principale figure de l’opposition, depuis la présidentielle –, mais aussi essayer de montrer que la situation sécuritaire serait désormais « sous contrôle » dans les zones anglophones où entre 5 et 15% seulement des habitants avaient voté à la présidentielle.
Seront-ils plus nombreux cette fois ? Les autorités l’assurent, plusieurs observateurs en doutent, sachant que les séparatistes ont imposé plusieurs jours de « villes mortes » menaçant de représailles ceux qui iraient voter et que l’ONG Amnesty International a alerté ces derniers jours sur une « flambée de violences » à l’approche du scrutin.
Un scrutin joué d’avance
Dans le reste du pays, la campagne n’a pas non plus suscité d’engouement. Beaucoup considèrent que cette double élection et surtout les législatives sont « jouées d’avance », explique encore le chercheur Arrey Elvis Ntui, le parti au pouvoir étant le seul à être en lice partout. Il se retrouve même sans concurrent dans 17 circonscriptions législatives et est déjà assuré du gain de 35 sièges à la prochaine Assemblée nationale.
Trente-cinq partis politiques sont en lice. Ils vont se disputer 180 sièges de députés et le contrôle de 360 exécutifs communaux pour près de 11 000 sièges de conseillers municipaux.
Selon les chiffres de Election’s Cameroon Elecam, 25 000 bureaux de vote seront ouverts à travers le pays pour un corps électoral de 6,8 millions d’électeurs.
Le RDPC, parti au pouvoir, va à ces élections avec le statut de grand favori. Principal parti de l’opposition au Parlement, le SDF avait dans un premier temps menacé de boycotter ces élections, mais la direction du parti s’était finalement résolue à y participer.
Parmi les autres partis en lice, on retrouve le Parti camerounais pour la réconciliation nationale, PCRN, du jeune opposant Cabral Libii, troisième à la présidentielle d’octobre 2018. Ce parti a de réelles chances d’engranger quelques sièges au Parlement et dans les conseils municipaux, surtout avec le désistement du MRC de Maurice Kamto, grand absent de ce double rendez-vous électoral.
Le MRC surveillera à coup sûr le taux de participationà ces élections, lui qui a appelé au boycott de celles-ci en raison notamment de la crise dans les régions anglophones et la non-révision du code électoral.
Les observateurs dénoncent une « obstruction »
Par ailleurs, plusieurs organisations de la société civile ont déploré ne pas avoir reçu les badges qu’ils avaient demandé pour observer le scrutin. La commission nationale des droits de l’homme dit n’avoir reçu qu’un tiers des autorisations sollicitées et dénonce une « obstruction ». Aucune pour l’ONG Un Monde Avenir qui, même sans être accréditée, a tout de même prévu de déployer les 1 300 observateurs qu’elle coordonne. RFI n’a pas pu joindre à ce sujet le ministre de l’Administration territoriale, chargé de délivrer ces accréditations.
Ces élections interviennent dans un contexte marqué par la persistance des défis sécuritaires dans le nord du pays avec la lutte contre la secte jihadiste Boko Haram et surtout la fronde indépendantiste dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Avec Rfi