Habitués à alerter des conséquences de chaque contrat d’armement du Maroc sur la souveraineté de l’Espagne, des partis politiques et des médias ont mis sous le boisseau leur obsession depuis l’annonce de la commande par les FAR d’un patrouilleur à la compagnie Navantia.
Le vendredi 8 janvier, la ministre espagnole des Finances, Maria Jesus Montero, annonçait la commande par la Marine royale marocaine d’un navire de guerre à la société Navantia. Outre son apport financier, estimé à 100 millions d’euros, le contrat d’assurance de l’emploi pour 250 salariés dont une majorité est originaire de la région de l’Andalousie.
Une bouffée d’oxygène pour les finances de la compagnie publique, d’autant qu’elle a déjà été écartée, le 30 avril dernier, de la course pour la construction de dix navires de la marine américaine pour un montant de 5 milliards d’euros. L’administration Trump a choisi de confier le projet au groupe italien Fincantieri.
Une fois n’est pas coutume, la droite plurielle espagnole a évité de condamner ou alerter des conséquences de l’achat d’armement par le Maroc sur la stabilité et la souveraineté de l’Espagne. Dans ce jeu, Vox et dans une moindre mesure Ciudadanos ainsi que des médias ibériques se sont récemment illustrés par les critiques systématiques à chaque annonce de contrat d’armement ou même de rumeurs.
La formation d’extrême droite, qui a fait du Maroc une obsession, a ainsi mis sous le boisseau ses inquiétudes. Pourtant en août, les députés de Vox ont proposé de consacrer jusqu’à 2% du PIB à l’armée. «L’Espagne maintiendra, ainsi, sa supériorité militaire en Méditerranée occidentale» et lui doit «assurer sa souveraineté sur les villes autonomes de Ceuta et Melilla, et sur l’archipel des Canaries», ont-il justifié.
Moins virulent que Vox, les craintes du parti Ciudadanos sont généralement exprimées par son eurodéputé, José Ramón Bauzá. Le parlementaire a «brillé» par ses interventions très particulières. En avril, il n’a pas hésité à solliciter les présidents des commissions des affaires étrangères à la Chambre des représentants et au Sénat des États-Unis d’électeur contre une commande des FAR de dix missiles antinavires de 62 M $. «Cela constituait un risque pour l’Espagne et affecterait négativement la stabilité dans le détroit stratégique de Gibraltar», a-t-il écrit dans sa lettre. Fin décembre 2020, l’eurodéputé a demandé à l’Union européenne de défendre son pays «face aux agressions du Maroc».
Sous prétexte de défendre le Polisario et les Sahraouis, l’extrême gauche exprime aussi son opposition aux armes acquise par le Maroc. En décembre la formation indépendantiste Gauche Catalane a demandé au gouvernement Sanchez de suspendre la vente des armes au royaume.
Enfin, cette obsession est très prégnante chez certains médias ibériques. Le 8 juillet, le site spécialisé infodefensa.com a consacré un article sur les nouvelles commandes des corps des FAR: «Les Forces armées royales du Maroc renforcent leurs capacités à un rythme prononcé». Et d’alerter que ses «dépenses ont augmenté de manière exponentielle à partir de 2008 jusqu’à ce que 3,8% de son PIB entre 2014-2015». El Confidencial a quant à lui établi la liste des dernières commandes passées par les Forces armées royales.
Les voix critiques sur l’armement du Maroc sont passées à un silence satisfait. La commande par le Maroc d’un navire de guerre à la compagnie Navantia a répondu de manière indirecte aux préoccupations d’une partie de la droite. Après la perte du contrat avec les États-Unis, la députée de Ciudadanos (opposition), María del Carmen Martínez a sollicité une intervention urgente du gouvernement espagnol pour sauver des centaines d’emplois directs et indirects dans la province de Cadiz.
Avec Yabiladi