L’un des numéros du président de la République française, Emmanuel Macron, figure dans la liste des numéros sélectionnés par un service de sécurité de l’Etat marocain, utilisateur du logiciel espion Pegasus, pour un potentiel piratage. Selon Le Monde, partenaire du «projet Pegasus» de l’organisation Forbidden Stories et Amnesty International, des numéros de téléphone appartenant à Edouard Philippe, alors Premier ministre, ainsi qu’à quatorze autres membres du gouvernement ont été visés. «Faute d’avoir pu examiner le téléphone du président de la République, il n’est pas possible de dire s’il a été infecté par ce logiciel espion, l’un des plus sophistiqués de la planète», précise le journal.
L’Elysée, contacté par Le Monde, a réagi aux révélations. «Si les faits sont avérés, ils sont évidemment très graves», indique-t-on, en ajoutant que «toute la lumière sera faite sur ces révélations de presse». «Certaines victimes françaises ont déjà annoncé qu’elles porteraient plainte, et donc des enquêtes judiciaires vont être lancées», poursuit l’Elysée.
Mais selon une analyse des données en la possession du quotidien, le numéro de téléphone d’Emmanuel Macron «a été saisi en mars 2019 par un opérateur au sein des services de sécurité du Maroc, (…) client, depuis plusieurs années, de NSO Group». La même source rappelle que le Royaume aurait ciblé plus de dix mille numéros, dont environ 10 % en France. «L’analyse technique d’un téléphone dont le numéro apparaît aux côtés de celui d’Emmanuel Macron a permis la découverte d’une trace identique à celles trouvées dans les portables de plusieurs dissidents ou journalistes marocains», explique-t-on.
Le Citizen Lab confirme, NSO et le Maroc réfutent tout espionnage
Au-delà du gouvernement et du chef d’Etat français, le quotidien ajoute que «plusieurs hauts responsables de partis et des députés figurent également dans la liste des cibles potentielles». Il cite «l’influent député La France insoumise Adrien Quatennens», tout comme deux personnages-clés de l’entourage d’Emmanuel Macron ont également été visés : Franck Paris, le conseiller du président sur les questions africaines, et Alexandre Benalla qui s’occupait de la sécurité d’Emmanuel Macron.
Groupe d’experts de haut niveau de l’université de Toronto qui traquent depuis plusieurs années les activités de Pegasus, le Citizen Lab a confirmé que des ciblages et des infections de téléphones ont été détectés en France entre 2018 et 2021 et que le logiciel était «piloté par un client de NSO Group au sein de l’appareil sécuritaire marocain».
Dans un communiqué transmis au Projet Pegasus ce mardi, le groupe Israélien NSO a affirmé qu’Emmanuel Macron «n’a pas, et n’a jamais été une cible ou n’a jamais été sélectionné comme une cible par des clients de NSO». Toutefois, «NSO ne précise pas sur quoi elle se base pour l’affirmer, l’entreprise précisant qu’elle n’a ‘pas accès aux données de ses clients, qui doivent toutefois fournir ce type d’informations’ à NSO en cas d’enquête», commente le journal. La firme israélienne a contesté également l’exactitude des informations publiées par les rédactions du projet.
Pour sa part, le Maroc a affirmé à plusieurs reprises, au Monde et à l’AFP, ne pas être client de NSO Group ni utilisateur de Pegasus. Dans une mise au point relayée par la MAP, le gouvernement du Royaume a exprimé lundi son «grand étonnement» quant aux révélations, en affirmant qu’il rejette et condamne catégoriquement ces «allégations mensongères dénuées de tout fondement».
Le Monde rappelle que les 10 000 numéros du listing marocain «font partie d’une liste de plus de 50 000 numéros de téléphone consultée. «La présence dans cette liste signifie qu’un client de Pegasus s’y est intéressé et a envisagé une possible infection», précise-t-on encore.