On les avait toutes presque oubliées, ces organisations qui se sont donné comme mission de défendre les droits des femmes. Quand Adji Sarr avait porté plainte pour viol, plusieurs personnes membres de ces organisations ont préféré porter le manteau de militant et sont montées au créneau pour défendre l’accusée, mettant d’emblée en doute la parole de celle que certains ont traité de «manipulatrice», d’autres d’«instrument d’un complot politique», ou pour les plus «compatissants», de «victime». Mais personne ne l’a crue. Ni soutenue.
Par voie de conséquence, son présumé agresseur se pavane partout au Sénégal, libre comme l’air, mis sous contrôle judiciaire par raison d’Etat, dans l’attente d’un procès dont on se demande si et dans quelles conditions il aura lieu. Et la présumée victime, Adji Sarr, elle, est obligée de se terrer pour sa propre protection.
Aujourd’hui qu’un autre cas de viol présumé secoue les réseaux sociaux, tous ceux qui étaient en léthargie reprennent du poil de la bête et crient haro sur le baudet, demandant le lynchage sur la place publique du présumé coupable. Position d’autant plus commode que le mis en cause est lui-même fils… d’un homme condamné pour des faits similaires. Comme quoi, mauvais sang ne saurait mentir !
Tant pis pour ceux qui, comme nous, pensent que l’on ne pourrait tenir les enfants responsables des crimes de leurs ascendants. Quoi qu’il en soit, le tollé a été si fort que le présumé violeur a été mis sous mandat de dépôt, à la grande joie de tous ceux qui l’ont déjà jugé coupable. Est-ce à dire que la sanction d’un crime dépend maintenant plus de la personne mise en cause que de la véracité des actes ? La présomption d’innocence n’est-elle recevable que quand on est un politicien connu, plus en tout cas, que quand on est le fils d’un repris de justice ?
Faudrait-il croire que les associations de défense des intérêts de femmes sont devenues, à l’image de nombre d’organisations dites des droits de l’Homme, des officines de défense de certains intérêts politiques, actionnées par des motifs ignorés du grand public ? Après cela, on viendra encore s’étonner de la désaffection qu’elles connaissent de plus en plus.