L’économiste Meïssa Babou juge que le petit commerce ne semble pas être dans l’ADN des Sénégalais, au regard de leurs échecs répétitifs dans cette activité désormais passée sous contrôle des ressortissants guinéens.
‘’Beaucoup de Sénégalais ont tenté et malheureusement échoué avec le petit commerce’’, a indiqué l’enseignant à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, dans un entretien avec l’APS.
‘’Beaucoup de Sénégalais ont tenté et malheureusement échoué avec le petit commerce’’, a indiqué l’enseignant à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, dans un entretien avec l’APS.
L’économiste sénégalais, analysant les échecs selon lui répétés des Sénégalais dans ce domaine, considère que ses compatriotes ne sont pas souvent préparés pour cette activité.
Il s’y ajoute que la proximité familiale et les dépenses liées aux cérémonies religieuses et familiales font que le boutiquier sénégalais se retrouve ‘’avec beaucoup de charges’’, selon M. Babou.
L’économiste rappelle que cette ‘’proximité avec les membres de la famille qui pousse ces derniers à passer prendre à crédit ou emprunter de l’argent au parent boutiquier installé dans le quartier est un facteur aggravant qui empêche, par moments, cette activité de faire floraison’’.
Il y a aussi que le petit commerce et des activités comme le portage par exemple sont souvent minimisés par le Sénégalais quand il vit dans son pays, relève Meïssa Babou. Cela fait désormais que ‘’les Guinéens occupent un espace économique très fort au Sénégal’’, analyse l’universitaire.
Meïssa Babou souligne toutefois que ces jeunes guinéens, à l’image des Sénégalais expatriés en Italie ou ailleurs, ‘’acceptent de vivre avec le minimum tout en adoptant des modes de vie qui peuvent leur permettre de réaliser des économies’’ destinées au pays d’origine.
Les échecs répétés des Sénégalais opérant dans ce secteur, ajoutés à l’expérience des boutiquiers mauritaniens qui ont pendant longtemps occupé le commerce de quartier, ont fait que le Sénégal, qui comptait quelque 3 à 4 millions d’habitants au début des indépendances, a dû s’appuyer sur les étrangers pour assoir son développement, selon Meissa Babou.
Le Sénégal et la Côte d’Ivoire, de par leur stabilité et leur vision du développement, ‘’constituaient à cette époque un peu l’Eldorado en Afrique de l’Ouest’’, fait-il observer.
Ces deux pays ‘’économiquement plus solides’’ de par leur monnaie, le CFA, encourageaient l’immigration avec les présidents Léopold Sédar Senghor au Sénégal et Félix Houphouët Boigny en Côte d’Ivoire, note l’économiste.
De cette manière, un expatrié guinéen au Sénégal ou en Guinée ‘’peut rentrer avec des devises très fortes pour l’économie de son pays’’, indique Meïssa Babou.
Une situation qui, à terme, peut avoir des conséquences sur l’économie sénégalaise, étant entendu qu’une ‘’économie possédée, dans bien des secteurs, par des étrangers, il va de soi qu’elle devient extravertie’’.
Interpellé sur l’arrivée des grandes surfaces qui signerait comme la mort programmée du petit commerce, Meissa Babou voit les nouveaux arrivants comme ‘’un grand régulateur du marché’’. Ils ne vont par conséquent ‘’pas définitivement renverser la mainmise guinéenne sur le petit commerce au Sénégal’’.
‘’S’il est dit qu’une grande surface installée dans un quartier tue le petit commerce sur un rayon de 500 mètres au moins, il n’en demeure pas moins que les grandes surfaces constituent des cadres d’hygiène qui participent à la qualité du produit et ne font pas de la spéculation sur le prix’’, note Meissa Babou.
En perspective d’une monnaie commune (Eco) au sein de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’économiste pense que même avec la même monnaie, il y aura des Guinéens qui sentiront ‘’le besoin de venir faire des affaires au Sénégal’’, compte tenu de la densité du tissu économique sénégalais.