L’annonce du gouvernement sénégalais de faire immatriculer toutes les motos Jakarta d’ici le 13 mars a provoqué une onde de choc chez de nombreux conducteurs. Pris de court par cette décision, beaucoup d’entre eux estiment que le délai imparti est trop court et appellent à une extension. Bien qu’ils comptent bien s’y conformer, les coûts et la complexité des démarches inquiètent la majorité des conducteurs de motos, souvent déjà en situation précaire.
Au rond-point Emg, à proximité de l’échangeur de Hann, l’animation est constante. Les automobilistes, coincés dans les embouteillages, klaxonnent, tandis que les conducteurs de motos Jakarta se faufilent entre les véhicules. Fallou et Chérif, deux conducteurs originaires de Fissel Mbadane, se tiennent au bord de la route, en attente de clients. Tous deux ont choisi le métier de conducteur après avoir échoué dans d’autres activités, notamment la vente de ferraille à Dakar.
Fallou Lô, qui a acheté sa moto à 410 000 FCfa, confie qu’il roule sans permis de conduire ni assurance, ne possédant qu’un Certificat de mise en circulation (CMC). Il fait partie de la grande majorité des conducteurs de motos Jakarta qui circulent dans l’illégalité. « Je vais faire les démarches pour obtenir ma plaque d’immatriculation », assure-t-il, mais il reconnaît que le délai est très court pour régulariser la situation de l’ensemble des conducteurs.
De leur côté, d’autres comme Moustapha Diop, un étudiant en licence à l’Université de Dakar, ont déjà commencé les démarches. Après avoir acquis une moto Tvs 150, il estime qu’il devra dépenser environ 70 000 FCfa pour obtenir tous les documents nécessaires, bien que l’État ait annoncé que l’immatriculation serait gratuite. « Rien n’est gratuit dans cette histoire », déplore-t-il.
Certains conducteurs comme Youla Mory ont déjà réussi à obtenir leur plaque d’immatriculation et leur carte grise, mais la plupart attendent encore d’avoir leur permis de conduire. Mory, qui a roulé dans plusieurs pays de la sous-région, estime que cette mesure est bénéfique, mais déplore les tracasseries quotidiennes. « A chaque contrôle, on est obligé de payer entre 6000 et 9000 FCfa pour récupérer notre moto », raconte-t-il.
Les associations de livreurs, représentées par Ibrahima Badji, secrétaire général des « Tiak Tiak », ont également exprimé leur soutien à cette nouvelle réglementation. Selon lui, la régularisation du secteur est essentielle pour assainir la profession. Il encourage ses collègues à se rendre dans les différents services pour immatriculer leurs motos, tout en demandant à l’État de faciliter le processus en augmentant le nombre de points d’enrôlement, comme le CICES.
Malgré l’appel à la régularisation, beaucoup de conducteurs dénoncent la lenteur des démarches administratives et les contrôles policiers fréquents, qui imposent des frais supplémentaires. Ces derniers insistent sur la nécessité de suspendre ces contrôles jusqu’au 13 mars pour permettre à tous de se conformer à la nouvelle règle.
Si la mesure est perçue comme un pas vers une meilleure organisation du secteur des motos Jakarta, elle soulève des préoccupations légitimes concernant la rapidité de sa mise en œuvre, les coûts associés et la capacité des autorités à gérer un afflux massif de demandes dans un délai aussi court.