L’ancien maire de Dakar, Pape Diop, voit le projet de suppression des villes comme une façon de vouloir arracher la mairie de Dakar des mains de la coalition de Khalifa Sall. Le leader de Bokk gis gis estime que le régime de Macky Sall veut ainsi éviter une «déconvenue» aux prochaines locales, comme celle de la coalition Sopi en 2009.
A l’image de Khalifa Sall, un autre ancien maire de Dakar condamné au projet de suppression des villes. Il s’agit de Pape Diop qui regrette qu’au lieu de «mobiliser toutes nos énergies pour lutter contre la Covid-19», le régime de Macky Sall a préféré «malheureusement distraire» les Sénégalais avec cette question qui ne relève que de « la politique politicienne ». Le président de la Convergence libérale et démocratique / Bokk gis gis avait certainement beaucoup à dire sur ce sujet au point de livrer son message par une contribution. Au-delà de «l’idée tout aussi saugrenue que surprenante» du ministre des Collectivités territoriales, du développement et de l’aménagement des territoires qui a nié l’existence de la ville comme entité dans le Code général des collectivités territoriales, Pape Diop estime que cela «prouve à suffisance qu’une éventuelle suppression des villes de Dakar, Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Thiès, relèverait simplement une manœuvre politique». Selon lui, «tout porte à croire qu’on ne cherche qu’à enlever la mairie de Dakar du giron de l’opposition sans passer par les urnes». Et cette «obsession» du pouvoir à prendre le contrôle de la capitale «à tout prix» s’est manifestée, il y a quelques mois, par l’idée d’agitée par la mouvance présidentielle de permettre au président de la République de «nommer par décret le maire de Dakar ». Le prédécesseur de Khalifa Sall à la Ville de Dakar avertit que la dissolution envisagée conduira «forcément à l’atomisation des communes alors qu’on devrait plutôt travailler à leur mutualisation pour plus d’efficacité dans leur fonctionnement, leur gouvernance et leur action en faveur des populations ».
«Les 19 communes correspondent exactement au nombre de coordinations du Ps à Dakar»
Pape Diop trouve d’ailleurs «très regrettable» que le pouvoir en place veuille «imiter» les Socialistes qui, en 1996, avait «totalement mis la capitale sens dessus-dessous». Mais en même temps, il confirme que cette réforme était calquée sur les coordinations du Parti socialiste à l’époque, comme l’a réaffirmé le Président Sall lors de son entretien avec la presse le 31 décembre. «Si Dakar souffre jusqu’à présent de phénomènes comme l’occupation anarchique et la` `cantinisation », c’est parce que l’ancien régime socialiste, obnubilé par la récupération de la capitale tombée dans l’escarcelle du Pds aussi bien à la Présidentielle jusqu’à Législatives de 1993, avait morcelé la ville en 19 communes d’arrondissement. Ce découpage qui correspondait exactement au nombre de coordinations du Parti socialiste à Dakar était ni plus ni moins qu’un stratagème pour la reconquête de la capitale. Hélas, pour n’avoir obéi qu’à ce simple calcul politique, il y a eu des conséquences fâcheuses sur l’évolution de la ville de Dakar depuis un quart de siècle », affirme l’ancien responsable du Parti démocratique sénégalais.
«Le régime de Macky Sall veut éviter le même cas de figure que celui du Pds en 2009»
Le leader de Bokk gis gis, qui appelle à une «forte mobilisation» contre cette suppression annoncée de la Ville de Dakar, insiste sur ce «calcul politique» de Macky Sall. «L’actuel régime veut en effet éviter par tous les moyens la défaite à Dakar et dans d’autres grandes villes lors des prochaines élections locales. Un scénario catastrophe qui ne serait pas de bon augure pour 2024 et qu’il lui faut donc empêcher à tout prix pour ne pas connaître le même cas de figure que celui du Pds à l’issue des Locales de mars 2009 », commente-t -il. Il rappelle qu’après avoir perdu le contrôle de grandes villes comme Dakar, Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Thiès, la coalition Sopi «n’a jamais réussi à se relever de ces défaites symboliques et retentissantes jusqu’à la perte du pouvoir en 2012 ». Et pour lui qui était l’un des candidats de cette coalition, «le régime de Macky Sall, à travers cette dissolution, tient à ne pas connaître la même déconvenue lors des prochaines élections locales pour ne pas aborder le cap de 2024 en mauvaise posture ».
Avec LeQuatidien