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Manifestation interdite de Yaw: RETOUR SUR UN FACE-À-FACE AUX ALLURES D’UN FILM D’ACTION

Les forces de l’ordre et les manifestants ont joué au jeu de cache-cache hier à la place de la Nation. Elles ont encaissé tous les coups pour les empêcher d’accéder à la place de la Nation. Malgré les différentes tentatives des manifestants, les dispositifs mis en place par les forces de l’ordre ont tenu.

Tout a commencé au rond-point de Colobane, ou un dispositif mis en place a été défié par des barricades et des pneus brûlés à quelques mètres des forces de l’ordre. Une épaisse fumée se propage dans l’air, empêchant de voir de l’autre côté de la ruelle menant au lycée John F. Kennedy. À quelques pas, on aperçoit des forces de l’ordre qui semblent attendre le feu vert de la hiérarchie pour riposter. Mais la situation va dégénérer lorsque les manifestants ont décidé de prendre d’assaut la place de l’Obélisque.

 

Dès après la prière du vendredi, les manifestants, par petits groupes, ont rallié la place. « Ne reculez pas, allons-y, personne ne peut nous empêcher de manifester », harangue un homme d’une cinquantaine d’années, avec un gros caillou entre les mains. Mais les tirs de gaz lacrymogène et des fumigènes de marque « Dispo Prop 200M et le Cs Plmp 7B » n’ont donné la moindre chance aux manifestants qui voulaient résister. Comme du piment dans l’air.

C’est le remue-ménage total. Beaucoup se sont retrouvés avec des blessures graves et des égratignures. Ils ont été vite pris en charge par les éléments de la Croix rouge. Mais cela ne douche pas l’ardeur de la foule qui riposte par des jets de pierres, des invectives, qui vont tout de même obliger les éléments en faction à lever le camp. Quelques minutes plus tard, les forces de l’ordre vont changer de stratégie, en menant des patrouilles, ratissant tous les coins et recoins de Colobane. Certains manifestants vont se réfugier dans la cour de la mosquée Massalikoul jinane. Tous les accès sont bloqués, on y voit des chauffeurs de bus tata et des taximen pris au piège, se démener pour s’en sortir, sous les enchaînements des détonations.

Le face-à-face interminable entre manifestants et forces de l’ordre

Sous une chaleur accablante, de jeunes manifestants tiennent tête aux forces de l’ordre. Ces dernières, comme à l’accoutumée, font usage des redoutables lacrymogènes pour les disperser. Et pour apporter la réplique, les jeunes s’arment de pierres essayant d’aller à l’offensive. Tel un film d’action, les deux adversaires du jour ne se sont laissés aucune chance. Les accrochages ne manquent pas.

Vers le boulevard du Centenaire, un groupe de policiers visiblement en infériorité numérique par par rapport à une bande de gaillards en face, se replient petit à petit, attendant que des renforts arrivent. Toutefois, les jeunes ne les laissent pas respirer. Croyant prendre l’avantage, ils appellent leurs camarades de l’autre côté à se former en groupes compacts pour mieux chasser les forces de l’ordre. « Ils ont épuisé leurs lacrymogènes, fonçons sur eux ! », crient-ils. Tout d’un coup, une voiture passe par une route un peu plus éloignée. A bord, une voix féminine raisonne : « Sonko, Sonko, Sonko… ! ».

Dans cette ébullition, on croirait assister à un règlement de compte entre les deux parties, tellement l’atmosphère est tendue. Les tout-petits enfants ne sont pas en reste. Surtout au niveau de la Médina. Ils courent à travers les ruelles et se fondent sans hésiter dans la masse. Les affrontements n’épargnent pas les transporteurs et les commerçants. Bref, l’économie est à l’arrêt. Très tôt à Colobane, avant le déclanchement des hostilités, les vendeurs ont vite plié bagage pour éviter la mauvaise surprise. Quant à la route, c’est le grand vide. De grosses pierres jonchent çà et là. Sans compter les pneus brulés. C’est le blocage total. Aucun bus pour transporter les quelques clients.

L’économie à l’arrêt
Pendant que les poursuites s’enchaînent à travers les rues, des éleveurs ou vendeurs de moutons veillent au grain sur le bétail. Ils jouent la vigilance pour éviter de se faire jouer un mauvais tour par des malfaiteurs. Malgré l’engouement populaire qui règne, ils ne se laissent pas faire. Comme s’ils étaient avertis de la présence de personnes mal intentionnées. Ainsi, la surveillance est accrue. Même chose dans les quartiers de la Médina. Les boutiques sont fermées. Chacun faisant de son mieux pour prendre ses dispositions. Les riverains ne peuvent s’empêcher de suivre les affrontements. Certains, depuis leurs balcons, regardent la scène aux allures d’un film cinématographique. D’autres descendent même plus bas pour se regrouper devant les portails afin de mieux suivre.

C’est toujours comme ça. À chaque fois qu’il y a de la manifestation, personne ne vaque à ses occupations. On est obligé de nous enfermer jusqu’au retour du calme », a déploré une dame. Tout au long de l’avenue Charles De Gaulle (boulevard du centenaire), la situation reste tendue. Devant la mosquée Khalifa Ababacar Sy, des manifestants ont fait pleuvoir une pluie de pierres sur les forces de l’ordre, qui semblent être en pénurie de munitions. Ces dernières vont battre en retraite, avant de revenir à la charge. Vers 17 heures, à notre départ des lieux, des jeunes de Fass, de la Médina et Colobane ont formé un attroupement à la rue 41 angle 3, cherchant les voies et moyens pour contourner les dispositifs policiers. Et de loin, on entend des détonations sporadiques.

Aux environs de 17h, les tensions baissent de plus en plus. La situation devient normale au fur et à mesure. La place de la Nation, prise d’assaut des heures plutôt, se désemplit. Seuls quelques policiers continuent de faire le tour pour des besoins de sécurité. Ils aident des enfants à passer. Ces derniers profitent de la tranquillité du moment pour rejoindre leurs domiciles.

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