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Soudan: l’heure du bilan après deux jours de grève

Pendant 48 heures, le Soudan a vécu un mouvement inédit, d’une l’ampleur toutefois difficile à mesurer faute de statistiques. Des dizaines de corporations ont débrayé. Une situation rare, sinon jamais vue sous Omar el-Béchir. Pour autant, le pays était loin de la paralysie. Avec une économie en berne, une partie des Soudanais n’a pas pu se permettre de perdre plus d’argent.

L’arrêt de travail s’est déroulé dans un calme relatif. La junte n’a pas tenté de bloquer l’action. Quelques militaires ont néanmoins essayé de briser certains piquets de grève. Mercredi, une altercation a fait au moins un mort.

Pour Khalid Omar Youssef, secrétaire général du parti SCP, les putschistes n’ont désormais plus qu’une option : écouter la population. Cela veut dire céder aux exigences des négociateurs civils pour le cas du Conseil souverain, l’organe qui va piloter la transition.

La dernière proposition de l’Alliance pour la Liberté et le Changement est celle d’un vote à la majorité simple et d’une rotation de la présidence. L’ALC ne serait d’ailleurs pas contre offrir le poste à un officier. « Mais pas pendant trois ans. Il faut une alternance avec un civil », indique Khalid Omar Youssef.

Pas de signe d’inflection des militaires

Pendant ces deux jours, les soldats n’ont pas montré une quelconque intention de céder. Leurs dirigeants ont multiplié les voyages à l’étranger, comme pour consolider des alliances.

« Ils ont peur de perdre leurs privilèges. Mais à la fin, la volonté des Soudanais prévaudra », avertit Khalid Omar Youssef.

Le secteur bancaire était à la pointe de la grève avec des centaines d’agences fermées pendant deux jours. Pour Soukhail Harafat Ahmed, chef marketing à la Farmers Commercial Bank, les regards sont désormais tournés vers les militaires. « La balle est dans leur camp. Ils doivent reprendre les négociations, abaisser leurs exigences et réduire leur présence dans la rue. Ils n’ont aucun intérêt à réprimer. Sinon on ira au clash, avec un bain de sang à la clé », estime-t-il.

Tariq Ahmed Wida Abdallah, diplômé en droit de 29 ans, demande aux civils de ne rien céder. « Je ne fais pas confiance aux militaires, témoigne-t-il. Ils se comportent comme l’ancien régime. Je n’accepterai pas leur présence dans la transition. Je compte sur nos négociateurs civils, mais nous sommes attentifs. S’ils dévient de la route, on les remplacera. »

Et si finalement les militaires refusent toute concession, Mohamed Ismael, ingénieur au chômage, a déjà en tête la prochaine étape. « Ce sera la désobéissance civile avec un blocage total du pays, prévient-il. Aucun import-export, aucun avion, plus rien. Les rues bloquées, et tout le monde assis par terre à attendre une meilleure réalité. Je pense qu’on peut faire ça les doigts dans le nez. »

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